lundi 31 mai 2021

L'Hirondelle noire : la fin d'une ère.

 

 

Ce n'est un secret pour personne, la population de la grande majorité des espèces d'hirondelles a chuté de façon drastique au cours des dernières décennies. Vers les années 70, il était possible d'observer la nidification de cinq des six espèces d'hirondelles dans les limites du village de Sainte-Croix-de-Lotbinière. Les "rustique", "bicolore", "noire" et "à front blanc" nichaient dans des cabanes ou dans des nids faits de boue, accrochés sous les auvents des maisons privées; la "de rivage" nichait en petite colonie près de la chute, au niveau du fleuve, dans des trous creusés dans la partie supérieure de la falaise, juste en dessous de la frise végétale qui coiffait cette falaise. Un Martin-pêcheur d’Amérique y avait également creusé un trou plus volumineux que ceux des hirondelles. En 2021, il ne reste que la "bicolore" et, surprenamment, la "noire".  Oui, c’est surprenant quand on sait que la « noire » est la moins commune des cinq espèces mentionnées jusqu’ici.

La colonie de Sainte-Croix est maintenant reconnue comme étant celle située la plus à l’Est au Québec. Nous devons l’établissement de cette colonie à M. Benoit Garneau qui résidait dans la maison où se trouvent encore les condos offerts aux hirondelles. L’entrepôt situé en arrière de sa maison appartenait à la famille Garneau qui a livré pendant de multiples décennies les produits laitiers dans le comté de Lotbinière. Avec l’arrêt des opérations est venue la vente de la maison et de l’entrepôt. Cependant, un autre membre de la famille Garneau habite dans la cour qui jouxte l’entrepôt et il continue l’œuvre de son frère en maintenant les cabanes à la disposition des hirondelles. Cependant, les nouveaux propriétaires de l’entrepôt ne sont pas chauds à l’idée de voir arriver des véhicules ou des personnes inconnues près de leur commerce. Et c’est bien compréhensible. Il risque d’y avoir de la circulation de leurs propres véhicules ou des véhicules de livraison et c’est par souci de prudence qu’ils préfèrent interdire l’accès aux personnes qui seraient intéressées à observer ou à photographier les oiseaux de plus près. Voici la note qu’ils ont fait parvenir au conseil d’administration du Club des Ornithologues de Québec < C.O.Q. >.

 

La colonie d'Hirondelles noires de Sainte-Croix de Lotbinière, sise au 6572, rue Marie-Victorin, se trouve sur une propriété privée et il importe d'user de discernement et de bonne conduite en allant faire de l'observation.

-- Ne pas stationner dans l'entrée ni ailleurs sur cette propriété privée.

-- Tenir compte du fait que stationner sur la route devant la propriété peut d'avérer dangereux, de même qu'encombrant pour la circulation automobile.

-- Il est idéal de se garer en sécurité à proximité et de marcher un peu avant d'atteindre un bon point d'observation.

-- Dans le respect de la propriété privée, il ne faut pas empiéter sur ce terrain privé.

Merci de bien respecter ces consignes, ce qui permettra au (nouveau) propriétaire de conserver son intérêt à poursuivre le maintien des installations à la disposition de la colonie.

 

Benoit a été mon laitier attitré pendant les 29 années où j’ai habité la maison de Lotbinière. C’était devenu un bon ami et c’était toujours un plaisir mutuel lorsque je me rendais annuellement constater l’état de sa colonie d’Hirondelles noires. Lorsque je me suis rendu sur le site, le 16 mai dernier, j’ai rencontré les deux nouveaux propriétaires. Je ne savais même pas que l’entrepôt avait été vendu et que la famille Garneau n’était plus propriétaire. Nous avons discuté une bonne vingtaine de minutes sur l’historique de cette colonie et mes liens avec la famille Garneau dont je connaissais tous les membres. Eux étaient réticents à l’idée de voir débarquer n’importe qui à n’importe quelle heure. Je leur ai parlé de l’importance de préserver cette colonie pour la biodiversité du coin. Ce que je crois, était le plus important. La présence des condos à Hirondelles noires semble assurée même si l’accès est interdit au public. Il faut respecter cet interdit si nous voulons préserver la colonie.

Voici quelques photos que j’ai pu faire au cours des dernières années de cette belle hirondelle format géant.

 

Hirondelle noire (femelle) / Progne subis subis  / Purple Martin. Le 16 juillet 2013 à Sainte-Croix de Lotbinière,

 

 

Hirondelle noire (transport de matériel pour le nid) et Moineau domestique. Le 13 mai 2017 au parc provincial de Rondeau, Ontario.


Femelle, le 08 juin 2020 le long de la route Janelle à Baie-du-Febvre, Québec.


Mâle, le 16 mai 2021 à Sainte-Croix, comté de Lotbinière, Québec.


   

Mâle cueillant du matériel pour la confection du nid. Le 16 mai 2021 à Sainte-Croix, comté de Lotbinière, Québec.

Si vous êtes de passage à Sainte-Croix et que vous désirez observer cette hirondelle, SVP le faire à distance en demeurant sur le bord de la 132.

 

@ bientôt.


lundi 24 mai 2021

Le Viréo mélodieux.

 

 

À l'oreille moins exercée, le chant très mélodieux de ce petit passereau ressemble beaucoup à celui du roselin (pourpré ou familier). Il est très vocal, donc facile à entendre, mais pas aussi facile que ça à apercevoir. Sa niche préférée se retrouve dans la canopée des arbres feuillus où il devient alors trop souvent indétectable. Au contraire des parulines et des roitelets, il se déplace lentement et il peut rester perché au même endroit pendant un bon moment tout en chantant. Dès qu'il revient au printemps, il mêle son babillage à celui des autres dans un concert qui vient caresser nos tympans et notre âme. Comme les autres membres des viréonidés, il est insectivore et il trouve sa subsistance non pas en poursuivant ses proies en vol, mais bien en inspectant minutieusement les branches, brindilles ou feuilles à la recherche d'insectes et autres arthropodes.

Dans les aires de reproduction, le Viréo mélodieux adopte une grande variété de forêts de feuillus, à la fois à l'intérieur et à la lisière de la forêt. Il est souvent trouvé dans des peuplements d'arbres matures bordant les champs agricoles et le long des routes, y compris dans les banlieues à faible densité avec de nombreux grands arbres et de vieux vergers; parfois dans des peuplements mixtes de feuillus et de conifères du niveau de la mer à 3 200 mètres d'altitude, dans l'ouest de l'Amérique du Nord, principalement de 900 à 2 500 mètres au Mexique. Dans les aires de non-reproduction, il fréquente divers habitats boisés, les broussailles et les plantations. .

 

Viréo mélodieux / Vireo gilvus gilvus  / Warbling Vireo

 

Les différentes espèces formant la famille des viréonidés possèdent un chant doté d'une structure similaire, consistant en de courtes phrases composées de plusieurs éléments, d'une durée d'environ une seconde et séparées par des pauses plus longues. Le chant du Viréo mélodieux est très différent; un gazouillis continu, d'une durée de 2,5 à 3 secondes. Les deux sexes chantent et l'espèce vocalise au cours de la migration. Le mâle chante sur le nid, mais lorsqu'il est proche de la femelle, il est normalement silencieux, ne chantant que sporadiquement, sauf lorsqu'il est engagé dans un duel vocal avec un autre mâle.

 

 


L'analyse du contenu de l'estomac (avril-octobre) indique que la très grande majorité (97%) de la nourriture est constituée d'arthropodes, y compris les araignées, les papillons et les mites, en particulier les chenilles lorsqu'elles sont disponibles, les coléoptères, les punaises et autres. La matière végétale demeure un composant mineur, consommée principalement en automne, et elle comprend certains fruits comme ceux du sureau et du sumac. Il y a peu de données sur le régime hivernal, mais par analogie avec les autres membres de la famille, il pourrait inclure plus de matière végétale que durant le reste de l'année. Il se nourrit principalement dans les niveaux supérieurs des arbres, en particulier dans la canopée, mais aussi dans les strates végétatives plus basses. Ses recherches de nourriture se font majoritairement à la surface des feuilles (en particulier) et des brindilles. Il obtient également une certaine proportion de proies en les cueillant alors qu'il volète sur place. Il capture des proies aériennes dans une bien moindre mesure. Sur les aires de reproduction, il se nourrit seul ou par paire; dans les zones d'hivernage, il se joint habituellement à des groupes formés de plusieurs espèces différentes.

 


Des 33 espèces différentes comprises mondialement dans le genre Vireo, cinq se reproduisent au Québec. De ces cinq espèces, deux se ressemblent au point qu'on puisse les mélanger. Le Viréo de Philadelphie ressemble au Viréo mélodieux, mais son chant est bien différent. Leur taille est sensiblement la même et le de Philadelphie a les dessous plus jaunâtre comparé à ceux du mélodieux. Au printemps, alors que les deux espèces arborent leur plumage nuptial, il est beaucoup plus facile de les différencier que lorsqu'on a affaire à un immature à la fin de l'été. La présence ou l'absence d'un trait entre l'oeil et la commissure du bec est un autre caractère important à observer. Mais les conditions d'éclairage et l'angle de vue avec l'oiseau ne permettent pas toujours de trancher le dilemme. J'ajoute ici une photo d'un Viréo de Philadelphie afin que vous puissiez constater la difficulté. Le chant est toujours la meilleure clé d'identification lorsque l'on compare ces deux espèces.


Viréo de Philadelphie / Vireo philadelphicus / Philadelphia Vireo


@ bientôt.

 

 

samedi 22 mai 2021

Observer les oiseaux en été

 

 

En me remémorant les débuts de ma passion pour les oiseaux, je dois admettre que je cessais mes activités d'observation en forêt dès que les insectes piqueurs faisaient sensiblement leur apparition, soit vers le début de juin. À cette période, je calculais qu'observer un moucherolle, même sur son nid, ne valait pas toutes les piqûres que je devais endurer pour ce faire. Assez pathétique à bien y penser, car une toute nouvelle réalité se révèle à nos yeux en période de nidification. Avec l'expérience des années m'est venue cette constatation que les mois de juin et de juillet fourmillent d'occasions de découvrir d'autres aspects de la vie des oiseaux.

Le mois de mai est sans doute celui des douze qui procure le plus de montées d'adrénaline chez les ornithologues amateurs. En plus de saluer le retour des nicheurs locaux, ce qui constitue une fête en soi, la vague migratrice apporte son lot d'espèces qui ne sont que de passage, en route vers leurs territoires de nidification situés plus au Nord. Une centaine d'espèces différentes peuvent garnir, en une seule journée donnée, le carnet d'observation des ornithologues plus expérimentés. Ces moments sont tellement stimulants qu'il est courant de ressentir un genre de spleen lorsque la cohorte d'oiseaux de passage nous quitte pour continuer leur périple migratoire. Et leur départ coïncide avec le début de nidification de plusieurs de nos espèces nicheuses. Juin s'avère un mois plus calme où il faut travailler un peu pas mal plus fort pour repérer l'oiseau plus silencieux dans la végétation dense. Les oiseaux ne chantent plus autant, car les couples sont formés, les nids construits et les oeufs bien en sécurité sous le ventre du parent qui couve. Et ajoutons à cela la présence remarquable des fameux insectes piqueurs qui ne cessent d'user d'imagination pour trouver, sur notre peau, le seul petit endroit non protégé par l'insectifuge... qu'on croyait pourtant avoir appliqué avec grand soin.


Ce Moucherolle tchébec / Empidonax minimus / Least Flycatcher est bien installé sur ses oeufs en ce 28 juin 2012, quelque part en Abitibi.

Je tiens tout-de-suite à préciser que l'idée de ce billet n'est pas de vous inciter à trouver des nids par tous les moyens. J'en ai souvent trouvé des nids, mais c'était toujours par pur hasard. Lorsque je l'ai fait pour celui du Moucherolle tchébec, je me tenais sur le bord d'une route forestière en surplomb d'un petit ravin quand j'ai vu un petit oiseau arrivé en vol. En le cherchant à la jumelle, je l'ai trouvé assis sur un nid. J'étais à environ cinq mètres du nid et j'ai pris la photo sans m'en approcher davantage. Si ça vous arrive, souvenez-vous qu'il faut toujours respecter la bulle de l'oiseau, ne pas détruire la végétation pour avoir une meilleure vue sur le nid et ne pas manipuler les oeufs ou le nid lui-même si l'oiseau s'envole. Les prédateurs de nids que sont plusieurs mammifères forestiers (écureuils, ratons, mustélidés...) comptent beaucoup sur leur odorat pour trouver des sources de nourriture. Donc, si vous laissez une trace odorante en vous rendant vers un nid pourtant bien protégé par la végétation avant votre intervention, il y a de fortes chances qu'elle constituera une véritable autoroute pour un prédateur au nez fin. C'est un pensez-y bien.

Le mois de juillet voit éclore des millions d'oeufs partout au Québec. La forêt, plus silencieuse depuis quelques semaines, laisse entendre les piaillements émis par les oisillons quand les parents approchent du nid avec une becquée constituée de succulents insectes. Les parents eux-mêmes sont plus facilement repérables avec leurs déplacements incessants pour nourrir leur progéniture ultra-affamée. Il y a beaucoup à apprendre sur les comportements des oiseaux au cours de ce mois. Nous entendons des sons nouveaux, surtout de la part des jeunes oiseaux, mais aussi des adultes qui doivent garder un contact constant avec leurs jeunes. Et cette activité débordante se constate dans tous les habitats, pas seulement en forêt.

 

Hirondelle rustique / Hirundo rustica erythrogaster / Barn Swallow. Saint-Antoine-de-Tilly, 09 juillet 2020.

 

Le mois d'août me laisse un goût doux-amer dans la bouche. Après l'effervescence et la fébrilité des mois de nidification, voilà que plusieurs espèces commencent déjà à déserter leur territoire ou à former des bandes qui se déplacent constamment à la recherche de sites riches en nourriture. On n'a qu'à penser aux groupes d'hirondelles qui se regroupent autour des milieux humides comme les marécages. On n'en voit plus aux abords de nos habitations. De même pour les carouges qui délaissent les champs et disparaissent de nos listes quotidiennes d'observation. Quelques espèces s'évanouissent totalement du paysage, déjà en route vers leur quartier d'hivernage. Oui, il reste encore des oiseaux nicheurs. Le Chardonneret jaune est reconnu pour nicher tard. En fait, il synchronise le nourrissage des jeunes avec la maturation des graines de graminées et autres plantes sauvages. Il y a également ces espèces qui répètent les nichées tant que la température est clémente et la ressource nourricière disponible. Le Merle d'Amérique est l'une de ces espèces prolifiques. Avez-vous déjà remarqué que le merle connait un regain vocal au courant de l'été? Au printemps, il chante pour établir un territoire et trouver une compagne. On l'entend à toute heure du jour. Lorsque la femelle couve, il cesse presque totalement de chanter. Ensuite, il aide au nourrissage. Quand les immatures quittent, le couple peut s'activer à une nouvelle nichée. Le mâle reprend alors un concert matinal, non pas pour trouver une autre compagne ou pour réclamer un territoire. Mais ce chant servirait à renforcer le lien entre les deux adultes. S'ils nichent une troisième fois, le mâle répètera le même comportement. Donc, si vous entendez en plein été un mâle recommencer à chanter avec ferveur alors que vous ne l'aviez pas entendu depuis quelques temps, c'est qu'une nouvelle nichée s'en vient. Ceci peut s'appliquer également à d'autres espèces, comme le Bruant chanteur.

Heureusement, vers la mi-août, les limicoles réapparaissent en provenance de leur aire de reproduction et en direction de leur aire d'hivernage situé plus au sud, parfois même jusqu'en Patagonie. Ils s'arrêtent de quelques jours à quelques semaines pour refaire leurs forces pour la suite du grand périple automnale.

 Je vous souhaite un bel été rempli de belles découvertes tout en respectant scrupuleusement nos oiseaux!

 

@ bientôt. 


mercredi 12 mai 2021

Un p'tit roux bien intriguant.

 

 

Vous connaissez l'Érismature rousse? Connue autrefois sous l'appellation de Canard roux? C'est normal que ça ne vous dise pas grand chose. Il s'agit d'un petit canard plongeur (i.e. qu'il plonge complètement sous l'eau pour aller chercher de la nourriture). En opposition à un canard barboteur qui ne plonge que l'avant de son corps pour se nourrir, laissant dépasser son arrière-train bien en évidence à la surface de l'eau. Pensez au Canard colvert. Vu sa petitesse et son caractère farouche, il est facile de passer sur un site idoine sans la repérer. Elle a cette particularité de pouvoir enfoncer son corps lentement dans l'eau jusqu'à disparaitre sans causer aucune ride à la surface... pour apparaître loin de son lieu d'immersion initial.

 

En période de nidification, ses habitats préférés sont les marais et les étangs d'épuration qui sont bien pourvus des invertébrés aquatiques dont elle est friande. Elle se nourrit à 75% de végétation qu'elle va chercher dans le fond de l'eau. Aussi des insectes aquatiques, des escargots et des crustacés. Je vous présente un beau p'tit mâle accompagnée d'une Oie des neiges. Question de vous donner une idée de sa grosseur.

 


 

Ce canard a aussi la particularité de lever sa queue à 90° à l'instar des troglodytes. 

 


 

Les deux premières images ont été captées le 07 mai 2021 sur les bassins de décantation le long de la route Janelle à Baie-du-Febvre. L'endroit le plus facile pour observer cette beauté entre Montréal et Québec.

 

La photo suivante a été prise le 09 juin 2020 sur le même bassin de décantation.

 


 

Et, toujours au même endroit, une femelle peut-être moins colorée, mais tout aussi intéressante à observer. C'était le 12 juillet 2015.




 @ bientôt.