vendredi 20 mars 2015

Que c'est beau... la beauté des oiseaux d'hiver !



Et oui, l'hiver. La seule saison au Québec qui ne peut se permettre d'empiéter sur la saison qui la précède ou qui la succède sans provoquer l'apparition de certaines humeurs négatives. En effet, alors que nous acceptons volontiers une température trop douce pour une saison donnée, c'est bien différent lorsque nous devons affronter une température en dessous de la normale. 

Et, comme basse température inhabituelle, nous y avons goûté en cet hiver 2014-2015. Nous avons battu des records de froid datant de plusieurs décennies et il semble encore, en ce 19 mars 2015, que le printemps hésite encore à s'affirmer. Un tapis de neige recouvre encore les champs, même ceux en bordure du grand fleuve Saint-Laurent.


Je me souviens très bien de mon premier 19 mars en temps qu'ornithologue en devenir (c'était en 1963) alors que, à partir de la fenêtre de ma chambre, j'observais pour la première fois de ma vie un groupe d'une dizaine de Carouges à épaulettes perchés dans un arbre à l'arrière de la maison familiale. C'est un souvenir qui restera graver à jamais dans ma mémoire. C'est une espèce que j'avais identifiée par moi-même en consultant le guide de Roger Tory Peterson, le seul et unique guide d'oiseaux disponible à ce moment-là. La photo suivante illustre l'espèce, mais dans un environnement où il adore nicher.



Carouge à épaulettes (mâle) / Agelaius phoeniceus phoeniceus / Red-winged Blackbird (male). Photo réalisée au marais Léon Provancher, Neuville, Québec.


Bon, je m'écarte du sujet. Même si je préfère les tropiques à notre saison hivernale, je dois avouer que cette période froide nous permet d'observer des espèces boréales qui se déplacent plus au sud lorsque la source de nourriture devient moins accessible dans la zone de distribution où ils vivent habituellement durant toute l'année. Ce qu'il y a de particulier avec ces oiseaux nordiques, c'est que leur présence n'est jamais assurée d'une année à l'autre.


En cet hiver 2014-2015, les tarins, les sizerins et les durbecs sont abondants. Il en est de même pour les jaseurs. Les gros-becs sont fidèles à eux-mêmes i.e. observés en petits nombres et dans leurs endroits habituels comme la Réserve Nationale du Cap Tourmente, près de Québec. Du côté des strigidés, les harfangs sont rapportés un peu partout alors que d'autres années, c'est l'absence presque totale. Les chouettes lapone et épervière sont présentes depuis le début de l'hiver. Malgré les froids intenses, elles sont demeurées fidèles aux sites où elles ont d'abord été trouvées. C'est plus tranquille du côté des nyctales. La petite est la seule rapportée. La boréale brille par son absence.


  
Le Jaseur boréal / Bombycilla garrulus pallidiceps / Bohemian Waxwing est un oiseau d'une grande beauté et il est spectaculaire à observer lorsqu'il est en mode "gavage de petits fruits". À ce moment-là, il est tellement obnubilé par sa tâche qu'il nous ignore complètement. En étant patient et respectueux, il devient possible de s'approcher de l'oiseau pour l'étudier de plus près. Photo prise en bordure d'une rue très fréquentée de Sillery, ville de Québec, Québec.


L'espèce se tient en groupes de quelques dizaines à quelques centaines d'individus et ils se nourrissent souvent dans un même arbre fruitier. Ce qui apporte souvent des frictions bien compréhensibles alors que deux individus reluquent la même baie rouge.


À l'aide de son bec long et très effilé, le Tarin des pins / Spinus pinus pinus / Pine Siskin peut facilement fouiller les bourgeons, les cônes des conifères ou les interstices de l'écorce du tronc ou des branches afin d'y prélever les graines ou les insectes qui s'y cachent. Ils mangent même les dits bourgeons et des feuilles tendres. En hiver, il se tient habituellement en petites bandes et il est un visiteur assidu aux postes d'alimentation. Photo réalisée à la Réserve Nationale du Cap Tourmente, près de Québec, Québec.


Voici une autre splendeur qui contribue à ensoleiller (dans nos coeurs tout au moins)  les journées les plus sombres et les plus ternes de l'hiver. Le Gros-bec errant / Coccothraustes vespertinus vespertinus / Evening Grosbeak apprécie la Réserve Nationale du Cap Tourmente puisqu'il y est présent PRESQUE à chaque saison froide. Oui, PRESQUE, car ses déplacements sont pour le moins très erratiques. D'où son nom.


Son gros bec est un puissant outil qui lui permet de briser facilement l'enveloppe pourtant coriace protégeant la graine des samares des différentes espèces d'érables poussant en Amérique du nord. C'est cette espèce qui attiré particulièrement mon attention alors que je n'avais que 12 ans. Et, 51 ans plus tard, voilà que je photographie un beau mâle dans le même contexte où je l'avais remarqué une première fois un demi-siècle précédemment.


Une autre espèce boréale vient apporter de la couleur à la blancheur de la froidure québécoise, le Durbec des sapins / Pinicola enucleator leucura / Pine Grosbeak. Cet hiver, nous entendions souvent ses doux sifflements avant de le voir. Sans être le plus loquace des fringillidés, il émet des cris de contacts qui trahissent sa présence. Photo réalisée à la forêt Montmorency, Parc des Laurentides, Québec.



Malgré que son bec soit moins impressionnant que celui du Gros-bec errant, il permet au durbec de broyer l'écorce des graines de tournesol déposées dans les différentes mangeoires. Une partie d'écale est encore accrochée au bec de l'oiseau alors qu'il s'empiffre sans vergogne. Photo réalisée à la Réserve Nationale du Cap Tourmente, près de Québec, Québec.


 Affublé de son béret rouge, voici le très nerveux et très dynamique Sizerin flammé / Acanthis flammea flammea / Common Redpoll. Son ancien nom de Sizerin à tête rouge lui allait d'ailleurs comme un gant. Comme tous ses cousins appartenant aux fringillidés, il se tient en groupes en saison hivernale. Encore là, le nombre total d'individus peut atteindre des chiffres assez impressionnants. Toute personne entretenant des postes d'alimentation souhaite en accueillir à ses mangeoires. Le comportement hyperactif de cette espèce amène énormément de vie dans une cour.


Et, parfois, avec un peu de chance, voilà que nous pouvons discerner un individu plus blanchâtre, moins strié et plus "bouboule" que tous ses congénères. Il s'agit bien souvent de son cousin le Sizerin blanchâtre / Acanthis hornemanni hornemanni / Hoary Redpoll. Même si cette photo date de 2013, nous avons eu la chance, Anne et moi, d'en observer cette année au même endroit où cette photo a été prise soit à Saint-Antoine-de-Tilly, comté de Lotbinière, Québec.


Une autre espèce qu'il fait plaisir à accueillir à notre mangeoire est le Roselin pourpré / Carpodacus purpureus purpureus / Purple Finch. Plus forestier que son cousin le Roselin familier, il visite les mangeoires des villes en période migratoire ou certains hivers. Ça fait dix ans que j'habite à Sillery et cette espèce ne s'est présentée dans notre cour que durant les quatre dernières années. Et c'était en période migratoire.  Cette année, deux individus nous ont visité quelques jours en février. Photo réalisée à la Réserve Nationale du Cap Tourmente, près de Québec, Québec.



Icône de nos durs hivers québécois, le Harfang des neiges (immature) / Bubo scandiacus / Snowy Owl compte parmi les espèces que nous ne voulons pas rater d'une saison froide à l'autre. L'hiver 2014-2015 a été généreux à cet égard.



La Chouette épervière / Surnia ulula caparoch / Northern Hawk Owl nous a également gratifié de sa présence à Montmagny, Québec. Elle y est toujours présente en mars 2015 alors qu'elle a été découverte dans les environs à la fin de 2014.



La Chouette lapone / Strix nebulosa nebulosa / Great Gray Owl est également très recherchée en territoire québécois. Cet individu, sans doute une femelle a cause de sa très grande taille, est demeuré longtemps dans le secteur de Beauport, ville de Québec, permettant ainsi à plusieurs observateurs de réaliser des moments de pure contemplation.


La Chouette rayée / Strix varia varia / Barred Owl est résidente dans la région et elle n'effectue pas les mêmes migrations que les espèces plus boréales. Cependant, elle est plus facile à repérer en hiver alors qu'elle se déplace davantage en plein jour en quête de nourriture. J'ai croisé cette dernière au Domaine Maizerets, ville de Québec, Québec.


Un autre icône de l'hiver québécois est le Plectrophane des neiges / Plectrophenax nivalis nivalis / Snow Bunting. Il arrive à la fin de l'automne comme poussé par les premières bordées de neige. D'ailleurs, les immenses groupes qu'il forme ressemblent étrangement, lorsqu'ils sont en vol, à de la poudrerie de neige soufflée par des vents violents.


Oui, c'est certain que nos hivers québécois recèlent de beaux trésors, mais, après six mois, il commence à être grand temps de retrouver nos immensités vertes.


@ bientôt,







2 commentaires:

Noushka a dit…

Superbe série Laval!
J'aime bien ton approche de l'hiver, je ne l'avais pas vu comme ça.... but it makes real sense! LOL!
Ces Carouges sont de toute beauté, les petits amiraux du monde ailé!
Je ne commenterai pas chaque photo mais je suis épatée par la diversité qu'il y a chez toi.
Avec le printemps établi, tu vas pouvoir faire de belles observations.
Dans 3 semaines on fait un saut en Australie, j'espère revenir avec quelques images, bien ce ne soit pas un "leasure trip"!
Bien amicalement

lejardindelucie a dit…

L'hiver et ses charmes, bien que le vôtre ait été particulièrement rude cette année.
J'admire aussi l'endurance et l'instinct de survie dont font preuve les oiseaux et les animaux pour passer cette période difficile.
Le carouge à épaulettes est un des premiers oiseaux que nous avons vu au Québec!
Le Jaseur boréal fait parfois "des descentes" en France mais jamais jusque dans mon Sud et nous avions été émerveillés des voir le Jaseur d'Amérique toujours chez vous!
Quand au Harfang c'est le plus bel oiseau du froid!
Le Tarin des pins ressemble bien à notre Tarin des aulnes qui ne s'est pas montré cet année à l'hiver trop doux!
Bravo pour ces belles observations où comme vos sujets il vous faut braver le froid!
Souhaitons que le printemps arrive rapidement, et vous permette d'autres belles rencontres chaque saison réservant ses surprises!