Des endroits merveilleux pour observer une grande variété d'espèces d'oiseaux autour de notre belle planète bleue, il y en a une multitude. Nous avons tendance à sous-estimer toute la richesse dissimilée dans un habitat propice. Il suffit d'y mettre du temps, d'épouser le rythme calme de la nature et de se fondre dans ce milieu pour y découvrir petit à petit tous les êtres qui y vivent. Des endroits m'ont marqué plus que d'autres et je m'y évade en pensée quand l'envie de partir me gagne et que je ne peux le faire tout de suite.
En mars 2006, j'organise un voyage ornithologique au Belize où nous visitons les points chauds. Après nous être d'abord arrêtés à Crooked Tree, nous nous dirigeons vers La Milpa Field Station.
1er mars 2006 : De Crooked Tree à La Milpa Field Station
Ce matin, Stanley vient nous chercher avec l’autobus à 8h00. Nous nous dirigeons ensuite vers notre deuxième site d'importance soit le Milpa Field Station. L’unique route carossable nous oblige à revenir vers la Northern Highway, à passer par Orange Walk, Yo Creek, August Pine Ridge, San Felipe et Blue Creek. Le tout devrait prendre environ 3 heures de conduite à une vitesse moyenne de 80 km/heure.
En arrivant dans la petite ville d'Orange Walk, nous pénétrons dans la première agglomération d’importance. Il n’y
a pas de buildings en hauteur et les rues ne sont pas tellement encombrées par
un trafic trop lourd. C’est une ville propre et on s’y sent très à l’aise. Nous
faisons une escale dans un super marché et nous en profitons pour acheter de
l’eau embouteillée et des friandises. Nous traversons ensuite le petit bourg de
Yo Creek et nous nous enfonçons toujours de plus en plus dans le pays des
Mennonites. La route principale, asphaltée, est dans une très bonne condition et
les déplacements, même ceux d’une durée de quelques heures, sont plaisants. Il y
a toujours des beaux paysages à regarder et des belles surprises peuvent se
manifester à tous moments. Nous atteignons la région de August Pine Ridge. Cette région, jusqu'à San
Felipe, est agricole et nous voyons des vieux tracteurs dans les champs et des
agriculteurs mennonites, facilement reconnaissables à leur salopette en jeans,
leur barbe et leur chapeau de paille. C'est un bel habitat pour espérer trouver
le Sporophile variable (Variable Seedeater). Un peu avant d'atteindre Blue Creek, un rapace blanc
fait du surplace au-dessus d’un champs, à la façon de la Buse pattue ou de la
Crécerelle d’Amérique. Nous identifions rapidement le Milan à queue blanche (White-tailed
Kite). Les champs des environs sont survolés par des hirondelles et nous
reconnaissons à l’œil l’Hirondelle rustique (Barn Swallow) et l'Hirondelle
bicolore (Tree Swallow). Un
beau spectacle nous attend alors que nous arrêtons
près de la route pour observer quelques Tyrans des savanes (Fork-tailed
Flycatcher), perchés bas et très près du chemin. Nous nous apercevons
bien vite
qu’il y en a partout dans ce champs. Il s’agit sans doute d’un bon
groupe en
migration vers le nord. Dans ces champs cultivés, six ou sept jabirus ont
été
observés la semaine précédente. Mais le manque de pluie fait qu’il n’y a
presque plus d’eau dans les parages. Nous devrons donc nous reprendre
dans des
grands marais situés près de la jonction de la route de terre qui part
de la route
principale et qui mène à La Milpa. Un peu plus loin, nous empruntons un
pont où
le seul Martin-pêcheur d'Amazonie (Amazon Kingfisher) du voyage sera
observé par
quelques participants. Ce pont enjambe une zone inondée où des chicots
de grands
arbres servent de perchoirs à de nombreuses hirondelles. Nous nous
arrêtons à
cet endroit dans l'espoir de trouver des Ridgway's Rough-winged Swallow.
Nous
n'y trouvons que des Hirondelles à ailes hérissées (Northern
Rough-winged
Swallow), mais c'est ici que j'ai la chance d’observer mon premier
Jaguarondi (Jaguarundi) à vie. Ce gros chat noir est très furtif et il est rare de le
voir en action en plein jour. C’est pourtant ce qui se produit,
alors qu’il traverse la route en gambadant, juste après que notre groupe
soit
passé. C’est par pur hasard que je me retourne pour regarder en arrière
de nous.
Nous arrivons finalement au Blue Creek
Village, petite bourgade mennonite où l’on doit passer un poste de fouilles si
on veut y accéder. Les Mennonites, un peu à la façon des Quakers ou des Amish,
vivent à l’ancienne, sans électricité et sans eau courante, labourant le sol
avec des bœufs et se déplaçant dans des calèches tirées par des chevaux. Ils
sont agriculteurs et, en fait, ils fournissent les légumes à une bonne partie du
pays. Nous aurons l’occasion d’en rencontrer quelques uns lors de nos
déplacements. Nous ne visitons pas ce village, mais nous faisons un bref arrêt
pendant lequel Jean Jacques Gozard nous entretient de leurs coutumes et de leur rôle
dans l’économie du Belize. Nous en profitons pour repérer un Tyran à
longue queue (Scissor-tailed Flycatcher), perché en évidence sur un fil
électrique. Nous nous arrêtons ensuite dans un restaurant local pour prendre un
bon dîner. Cette pause nous donne l'occasion de côtoyer des gens de la place et
de constater la gentillesse et l'hospitalité des gens du coin.
Avant donc de prendre une route de terre
sur notre gauche, en direction de la Milpa Field station, nous la dépassons pour
arriver à un milieu très humide où nous tentons notre chance pour le jabiru.
C’est un endroit de toute beauté où des gros groupes de Sarcelles à ailes bleues (Blue-winged Teal) et de Dendrocygnes à ventre noir (Black-bellied
Whistling-Duck) ne cessent de s’envoler au-dessus des joncs et des hautes
herbes. Tous les ardéidés sont là et en plusieurs exemplaires. Les jacanas,
foulques et gallinules sont observés sur les différents plans d’eau. À un moment
donné, la vue de gros oiseaux blancs, à côté des Grandes Aigrettes (Great Egret),
nous donne de faux espoirs puisqu’il s’agit en fait de nos premières Tantales
d’Amérique (Wood Stork). En fouillant dans les arbres feuillus, nous trouvons
plusieurs Bihoreaux violacés (Yellow-crowned Night-Heron) et une Crécerelle
d'Amérique (American Kestrel) nous épie du haut de son perchoir alors que
l'autobus passe en dessous d'elle.
Comme il se fait tard, nous retournons lentement au camp et voilà que des petites flaques d'eau en bordure du chemin font office de bains d'oiseaux . Nous nous arrêtons à environ 30 mètres des trous d'eau et nous observons se succéder: la Grive des bois (Wood Thrush), la Paruline du Kentucky (Kentucky Warbler), l'Évêque paré (Blue Bunting) et l'Ermite à gorge rayée.
Après un bon souper, nous faisons la liste et nous compilons 125 espèces pour la journée et 191 espèces pour le voyage.
Autant vous entretenir tout de suite de quelques chiffres concernant ce site où se retrouve une belle forêt, riche en nature et en histoire. Cette réserve a vu le jour en 1988, après une entente intervenue entre Gallon Jug Industries et Program for Belize (organisation gouvernementale) pour un premier territoire couvrant 110,044 acres. En 1990 et en 1994, Coca Cola Foods Inc ajouta des acres, si bien qu'aujourd'hui, cette réserve couvre 245,822 acres et elle constitue la plus grande réserve protégée du Bélize. Sa situation géographique, au centre nord du pays, la rend importante pour la survie d'espèces endémiques du Peten (Mexique) et du Yucatan (Mexique) et la frontière guatémaltèque toute proche fait qu'elle participe activement aux efforts de conservation des deux pays limitrophes. Cette forêt appartient à la zone subtropicale humide et elle est constituée d'essences forestières de type décidu (avec des essences à feuilles très grandes), de savanes et de marécages. Elle partage avec le Peten la diversité animale. Plus de 70 espèces de mammifères ont été répertoriées (la moitié étant des espèces de chauve-souris). 390 espèces d'oiseaux dont le quart sont des migrateurs du nord. Cette région, même après une exploitation forestière de 150 ans, est reconnue pour maintenir la plus grande concentration de Mahogany et de Sapodilla (d'où on tire le "chicle", à l'origine de la fabrication de la gomme à mâcher). 230 espèces d'arbres ont été répertoriées jusqu'à présent. En tant qu'extension du Peten, la proportion d'espèces endémiques aux deux pays est grande.
Les seuls habitants de ce secteur sont les employés du PFB et leurs familles. Un petit nombre de petits fermiers qui s'étaient installés illégalement ont été relocalisés à l'extérieur du parc. La communauté mennonite de Blue Creek (population de 567 habitants) est, quant à elle, située plus au nord. La Milpa Field station fournit abri et nourriture pour une trentaine de visiteurs à la fois. Un système élaboré de sentiers balisés et bien entretenus et la disponibilité des employés du centre qui peuvent servir de guides font que les visiteurs peuvent profiter du site à sa juste valeur. Le nombre annuel de visiteurs tourne autour de 1200 et la proportion des gens du Belize est de 50%
L'héritage culturel de la région est grand puisque 60 sites mayas ont été localisés, allant du site où se déroulaient les cérémonies majeures, aux temples faisant office de sépulture, aux emplacements de jeux et aux terrasses, jusqu'aux sites industriels où on confectionnait les outils. La plupart des sites ont vu le jour aux 8ième et 9ième siècles avant JC.
2 mars 2006 :
Medicinal Trail et Lagunita Trail en AM; Bajo
Trail en PM
Après une première nuit réparatrice, dominée par les cris
de l'Engoulevent pauraque (Pauraque) ou les sifflements plaintifs du Grand
Tinamou (Great Tinamou), nous sortons tous
dehors aux premières lueurs du jour. Pas question de manquer l'éveil de cette
belle nature, en pleine forêt tropicale. Nous garderons le même scénario pour
tous les matins passés à la Milpa. Un café chaud est servi dès 5h45 et, quinze minutes plus tard,
nous sommes prêts à partir pour une petite excursion à pied jusqu'à 7h30. Une
telle routine est facile à établir quand il y a toujours des belles découvertes
à faire, matin après matin. D'abord, il y a les espèces fidèles, celles qui se
retrouvent invariablement au même endroit, à la même heure: un petit groupe
familial de Passerins indigos (Indigo Bunting), un Tyran de Wied (Brown-crested Flycatcher) qui
nous houspille de son cri d'alarme puissant et sec, le gros Saltator à tête
noire (Black-headed
Saltator) qui annonce très bruyamment son arrivée, ainsi que différentes
autres espèces de petits passereaux (parulines, viréos, orioles et moucherolles)
qui animent les buissons, les arbustes et les arbres. L'oiseau-vedette de cette
première escapade d'avant déjeuner est le Tangara à miroir jaune (Yellow-winged Tanager).
Et nous entendons aussi pour la première fois le Tétéma du Mexique (Mexican
Antthrush), une espèce reconnue par certains comme une espèce distincte et par
d'autres comme une sous-espèce du Tétéma coq-de-bois (Black-faced
Antthrush). Avec toute cette nature qui s'éveille, c'est toujours un peu à regret que nous regagnons la salle à
manger pour le déjeuner, mais la nourriture excellente nous fait patienter
quelques minutes avant d'entreprendre la vraie journée.
Ce matin, notre guide local, Vladimir, nous propose de
parcourir deux sentiers soit le Medicinal Trail et le Lagunita Trail, les deux
couvrant une
distance totale de deux kilomètres. Et nous aurons également un autre compagnon très
inusité en la personne d'Agadou, un Dindon ocellé (Ocellated Turkey) qui nous a
adopté dès les premiers moments de notre arrivée à La Milpa. Ce nom d'Agadou lui est attribué par notre groupe et je ne me souviens plus de toutes les pirouettes de l'esprit ou les associations de mots faites pour en arriver à ce résultat. Aussi difficile à
croire que cela puisse paraître, Vladimir nous dit que c'est la première fois
qu'il voit ce genre de dindon suivre un groupe de personnes. Agadou nous suit
pas à pas, autant en milieu ouvert qu'en milieu forestier. Quand nous nous
arrêtons de longues minutes pour observer un oiseau ou un "feeding flock", le gros
dindon en profite pour picorer dans le sous-bois, jamais à plus de cinq mètres de
nous. La photo ci-haut a été prise par moi, à mains levées, sans aucun
grossissement. C'était assez irréel comme situation.
Comme il ne pleut pas, les sentiers sont toujours très secs
et il fait bon se promener dans une belle forêt mature. Notre première grande
surprise ne tarde pas à venir quand Vladimir nous avise qu'il vient d'entendre
le très recherché Motmot nain (Tody Motmot). Et voilà que l'oiseau se tient bien
perché, très en évidence et que nous l'observons "pleine grandeur" dans nos lunettes
d'approche. Il se permet même de vocaliser alors que nous l'observons avec grand
intérêt. Même si le Belize est l'endroit le plus sûr en Amérique centrale pour observer cette espèce (après
ou à égalité avec la région du Darien, dans la partie est du
Panama), nous n'en observerons pas d'autre durant tout le reste du voyage.
Quelques pas plus loin, c'est un magnifique Tangara à gorge noire
(Black-throated Shrike-Tanager) qui se laisse admirer sous toutes ses coutures.
Cette espèce, tout comme son cousin costaricien, le Tangara à gorge blanche
(White-throated Shrike-Tanager), agit toujours comme indicateur qu'une colonne
de Fourmis légionnaires (Army Ants) est dans les parages. Un groupe de Cardinaux à ventre blanc (Black-faced Grosbeak),
toujours aussi loquaces,
passent furtivement haut dans la canopée et un Piauhau roux (Rufous Piha) bien en
voix refuse de se laisser voir. Un autre coin de forêt abrite un Antriade
turdoïde (Thrushlike Shiffornis), facilement repérable à son sifflement
caractéristique. On ne tarde pas à le repérer dans la végétation assez épaisse.
Vers 10h30, alors que nous marchons à découvert, nous observons les rapaces
qui profitent toujours davantage des thermales à partir de cette heure-là: un
Sarcoramphe roi, un Aigle tyran (Black Hawk Eagle) et un Aigle
orné (Ornate Hawk Eagle) sont parmi les espèces les plus remarquables. En
revenant au camp pour le dîner, nous prenons le temps d'observer les
Ridgway's Rough-winged Swallow qui sont résidentes à la Milpa. Elles viennent
même se percher sur le bras de notre galerie et nous pouvons les observer à partir de
l'intérieur de notre chambre
.
Après un dîner copieux et une petite sieste, nous
repartons à pied vers les 15h00 pour aller découvrir le Bajo Trail, une boucle
d'à peine un kilomètre, mais qui nous réserve de très belles surprises. Nous
venons à peine de parcourir une centaine de mètres que le sentier est traversé par une
colonne de Fourmis légionnaires. Il n'en faut pas plus pour
observer nos premiers PAF du voyage. J'appelle ainsi les espèces d'oiseaux si
intimement associées aux Fourmis légionnaires qu'ils en ont acquis l'épithète de
professionnelles (Professional Army ant Followers). Ces oiseaux ne suivent pas
les fourmis parce qu'ils s'en nourrissent, mais plutôt que ces masses de fourmis
voraces avancent en colonnes très serrées et elles dévorent tout ce qui leur
tombe entre les mâchoires: arthropodes, insectes, petits mammifères ou
reptiles. Au passage de ces prédateurs, les insectes s'enfuient par tous les
moyens et les oiseaux en profitent pour les gober et les avaler tout rond. Parmi
ces espèces d'oiseaux spécialisées, nous avons la chance d'observer le très
coloré Grimpar roux (Ruddy Woodcreeper) et le Grimpar à ailes rousses
(Tawny-winged Woodcreeper). Les deux espèces sont tellement occupées à se nourrir
qu'elles se perchent très près de nous. Pour moi, le Grimpar roux est un "lifer"
et je me paie la traite. Il faisait partie depuis trop longtemps de ma
"wish list". Un peu plus loin, nous arrivons dans un habitat où on a le plus de
chance de trouver la très localisée Paruline à plastron (Gray-throated Chat),
une espèce très furtive qui se tient dans le faîte des arbres. Comme Vladimir
connaît bien son chant, notre attention se porte sur tous les bruits nouveaux
qui viennent faire vibrer nos tympans. Un cri spécial interroge tout le monde,
notre guide y compris, et nous trouvons finalement l'auteur, un Renard gris
(Gray Fox) attiré par notre présence et qui s'enfuit dès qu'il se sent épié. Et
voilà que l'oiseau recherché se fait entendre et nous pouvons observer le mâle
et la femelle qui s'activent dans le feuillage épais. Un groupe de Geais
verts (Green Jay) nous survolent en piaillant, mais la plupart des observateurs
ne verront qu'un bout de queue ou de ventre, pas assez pour pouvoir les cocher.
Le Grimpar à bec ivoire (Ivory-billed Woodcreeper) sera la dernière espèce
nouvelle à être découverte dans ce sentier.
Après un délicieux souper, nous faisons notre liste
quotidienne et une expédition nocturne d'une heure est offerte à
ceux qui désirent étirer un peu plus une journée déjà bien remplie. Cette
expédition se fait par groupe de six et les participants s'assoient dans la boîte
d'un pick up. Valdimir se tient debout à l'avant de la boîte du camion et
éclaire les environs avec un projecteur puissant. Le camion va lentement et nous
avons tout le temps d'observer les êtres vivants qui se dévoilent à nos yeux. En
cette première soirée, nous observons un Renard gris, quatre Cerfs de Virginie
et sept Chouettes mouchetées (Mottled Owl).
Les autres observations intéressantes de la journée: le
Jabiru d'Amérique (en vol par Jean Jacques seulement), le Caïque à capuchon
(Brown-hooded Parrot), le Martinet de Cayenne (Lesser Swallow-tailed Swift), le
Colibri jacobin (White-necked Jacobin), le Toucanet émeraude (Emerald Toucanet),
le Pic or-olive (Golden-olive Woodpecker), le Grimpar fauvette (Olivaceous
Woodcreeper), le Manakin à col blanc (White-collared Manakin), le Manakin à
cuisses jaunes (Red-capped Manakin), le Microbate à long bec (Long-billed
Gnatwren), le Troglodyte à ventre blanc (White-bellied Wren), l'Évêque bleu-noir
(Blue-Black Grosbeak) et le Tangara à tête grise (Gray-headed Tanager).
Nous cumulons 98 espèces pour la journée et nous en sommes
à 225 espèces pour le voyage.
3 mars 2006 :
site Maya de La Milpa en AM; le centre de
compostage en PM
Après le déjeuner, nous utilisons
les deux véhicules du centre pour nous rendre sur le site archéologique maya de
la Milpa, à quelques kilomètres de route. C'est quand même très impressionnant
de se retrouver dans des lieux animés jadis par un peuple inventif qui a su
créer un empire qui a rivalisé d'ingéniosité avec les Incas d'Amérique du Sud.
S'il existe encore des descendants Mayas, les coutumes ancestrales ont disparu
depuis belles lurettes.
Comme il n'a été découvert que depuis
quelques décennies, ce site n'est pas encore nettoyé sur toute sa superficie, ce
qui fait que la majorité des structures sont enterrées sous des tonnes de terre.
Malgré cet état, certains petits temples servant de sépultures ont déjà été
pillés. Vladimir, grâce à des dessins, nous montre ce qui se cache sous ces
monticules de végétation et nous fait comprendre ce que la vie quotidienne
pouvait avoir l'air à ce moment-là. C'est difficile d'imaginer que plusieurs
dizaines de milliers de personnes vivaient ici et que des enfants, sans doute
aussi énergiques que les nôtres, égayaient la forêt de leurs cris. C'est donc
avec un sentiment d'émerveillement et de respect que nous marchons lentement
dans cette belle forêt. Les grands arbres sont droits et ils atteignent
facilement les trente mètres de haut. Le sous-bois est quand même assez éclairci, ce
qui nous donne une bonne vision des oiseaux qui peuplent les environs. Nous
découvrons ici des belles espèces, dont plusieurs sont des nouvelles pour le
voyage: l'Amazone poudrée (Mealy Parrot), la Dryade couronnée (Purple-crowned Fairy), l'Araçari à collier (Collared Araçari), le Pic enfumé (Smoky-Brown Woodpecker),
le Pic roux (Chestnut-colored Woodpecker), le Moucherolle royal (Northern Royal-Flycatcher), le
Pipromorphe roussâtre (Ochre-bellied Flycatcher), le Smaragdan émeraude (Green Shrike-Vireo),
la Paruline à ailes dorées (Golden-winged Warbler), la Paruline à couronne dorée
(Golden-crowned Warbler) et la Paruline à flancs marron (Chestnut-sided Warbler).
Après un bon dîner,
nous profitons d'une
couple d'heures pour nous reposer, pour lire ou pour faire un peu de lavage et
nous
repartons vers les 15h00 pour une visite au site de compostage du centre, nommé
également la décharge. C'est en fait une fosse d'environ six mètres sur quatre mètres,
avec une profondeur de deux mètres, où tous les restants de table et de cuisine sont jetés. C'est à ciel ouvert, en pleine
forêt et les nuées d'insectes qui survolent les matières en décomposition
attirent une bonne variété d'oiseaux. Elle est située à quinze minutes de marche
de nos chambres et nous empruntons le large chemin en terre battue pour nous y
rendre. Vladimir a pris soin d'aller installer deux bancs, les mêmes qui servent
à s'asseoir dans les boites de camion pour les sorties nocturnes. Sur la photo, je suis en compagnie de mon ami Jean-Guy Picard. Même si les
lieux sont enveloppés d'une odeur assez particulière, c'est très tolérable et
l'agitation des oiseaux nous fait oublier ce côté assez facilement. C'est donc
en position assise, pour la moitié du groupe, ou en position debout mais
immobile pour l'autre moitié, que se font les observations durant l'heure qui
suit. Et quelles belles observations: un couple de Jacamars à queue rousse (Rufous-tailed
Jacamar) est perché à quelques mètres seulement de nous et ils sont affairés à
surveiller les insectes qui survolent la fosse. Une Paruline à capuchon femelle
(Hooded Warbler) se promène lentement en face de nous et elle est imitée par
quelques Tangaras à tête grise (Gray-headed Tanager) qui nous dévoilent des
oiseaux d'une grande beauté. Je ne peux m'empêcher d'avoir une pensée pour mon
ami Pierre Bannon qui aurait fait des photos sublimes comme seul lui sait en
faire. S'affairent également un Grimpar à ailes rousses (Tawny-winged Woodcreeper)
qui nous montre les plaques aux ailes qui lui valent son nom et le diminutif Platyrhynque à queue courte (Stub-tailed Spadebill) vient rendre quelques
visites au ravissement des observateurs ébahis. Celui que j'appelle
affectueusement le "tididoc", à cause de son cri très particulier, est entendu à
tous les jours, mais très rarement vu. Et voilà qu'il se tient là immobile et nous pouvons l'observer sous tous les angles. Un vrai petit bijou !!! Une espèce
plus familière pour nous les Québécois que nous sommes, soit un Moucherolle à
ventre jaune (Yellow-bellied Flycatcher), se perche à deux mètres maximum et il
reste dans les parages pendant quelques minutes. Une des vedettes de ces lieux
est la Colombe à front gris (Gray-fronted Dove) qui se promène lentement le long
du sommet de la fosse. Encore là, nous nous permettons une observation extensive
de ce beau colombidé.
Il commence à se faire tard et le cri
lointain du Grand Tinamou ou le roucoulement plaintif du Pigeon
ramiret (Scaled Pigeon) nous font comprendre que la journée tire à sa fin. Nous
revenons lentement par la route quand nous apercevons, à une distance d'une
trentaine de mètres, les petits trous d'eau qui servaient avant hier de bains
aux oiseaux de la forêt. Nous décidons d'attendre un peu en retrait et de
vérifier si les mêmes espèces vont se représenter à ces lieux d'ablution. Alors
que les premières Grives des bois (Wood Thrush) se présentent farouchement, nous
voyons arriver sur la gauche une espèce de pigeon bas sur pattes et tout foncé. Et
oui, une Colombe rouviolette (Ruddy Quail Dove) qui vient s'abreuver avant la
nuit. Et cet autre petit oiseau au ventre jaune et aux moustaches noires, et oui
la Paruline du Kentucky (Kentucky Warbler) est de retour. Une version semblable,
mais en format réduit, de la Grive des bois est bientôt identifiée comme la
Paruline couronnée (Ovenbird). Le seul colibri à se présenter est toujours
l'Ermite à gorge rayée. Je ne sais pas où étaient les tinamous les autres journées, mais ce soir, nous entendons également le Tinamou
de Boucard (Slaty-breasted Tinamou) et le Tinamou cannelle (Thicket Tinamou). Et
le gros Carnifex à collier (Collared Forest-Falcon) est l'un des derniers
oiseaux diurnes à se faire entendre avant la noirceur.
Après la liste quotidienne, un petit
groupe ira faire une sortie nocturne où seront observées les mêmes espèces que
la veille avec, en prime, l'Engoulevent pauraque.
Nous bouclons cette journée avec 100
espèces pour la journée et nous en sommes à 243 espèces pour le voyage.
4 mars 2006 :
Well's Trail en AM; Mahogany Trail et centre de
compostage en PM
Après une autre nuit très confortable, nous entamons notre
tournée d'avant déjeuner. Cette excursion nous donnera l'occasion ce
matin de tous observer un couple de Tohis à dos vert (Green-backed Sparrow),
facilement attirés à découvert par l'enregistrement de leur propre chant. Je
demande à Jean Jacques si on ne pourrait pas se concentrer ce matin pour attirer
un Tétéma du Mexique (Mexican Antthrush). Cette espèce est vocale toute la
journée, mais elle semble plus réceptive à répondre et à être attirée par son
chant plus tôt en journée. Nous nous rendons donc dans le secteur où nous l'avons
entendu deux jours plus tôt. L'oiseau commence à vocaliser par lui-même et Jean
Jacques enregistre son chant et lui fait entendre à un rythme espacé et le plus
naturel possible. L'oiseau s'approche lentement et il est maintenant bien près.
Mais impossible de le voir. En revenant sur nos pas, nous observons des
colibris qui butinent dans les grosses fleurs d'un arbre fruitier. Nous identifions
l'Émeraude de Canivet (Canivet's Emerald), le Campyloptère pampa et la Dryade couronnée (Purple-crowned Fairy).
Après le déjeuner, alors que nous sommes encore à la
salle à manger du centre, j'entends un son familier, mais que je n'ai pas
entendu depuis au moins cinq ans (la dernière fois étant dans les Andes
équatoriennes en 2000). Je crois reconnaître le Carnifex barré (Barred
Forest-Falcon) et je le mentionne à Jean Jacques. Ne connaissant pas son chant, il ne
peut me le confirmer. Mais voilà qu'arrive Vladimir et ce dernier nous souligne
qu'il vient d'entendre l'espèce. Ordinairement, ce carnifex répond très bien à
son chant, mais il semble plutôt timide ce matin. Nous entendons aussi le
Carnifex à collier (Collared Forest-Falcon) qui crie dans le lointain.
Notre excursion de ce matin se fait dans un autre beau
sentier qui mène à un ancien puits, d'où son nom de Well's Trail. C'est une
belle forêt primaire et les sentiers sont bien balisés. Les espèces-vedettes
dans ce sentier sont le Grand Hocco (Great Curassow), la Pénélope panachée
(Crested Guan) et le Tamatia de Lafresnaye (White-whiskered Puffbird) que nous
ne faisons malheureusement qu'entendre. L'entrée du sentier se situe à une
dizaine de minutes de marche du centre et nous sortons très près de nos
habitations. Pour moi le hocco est un rêve depuis nombre d'années. Même s'il est
sur la liste du voyage, je l'ai manqué tellement souvent auparavant que je ne
l'ai pas du tout en tête. Quand Jean Jacques me dit qu'il l'entend, mon sang ne
fait qu'un tour. Ce gros cracidé émet des sons très bas et sourds qu'on
n'associe pas à ceux d'un oiseau. Jean Jacques enregistre ces sons et les
repasse. Tout le monde retient son souffle, car on "sent" que l'oiseau
s'approche. Et voilà qu'il apparaît au-dessus de nos têtes, en vol plané. La
grosseur de son corps et la largeur de ses ailes impressionnent à coup sûr. Nous
avons le temps de voir sa tête hirsute et le bas ventre blanc. Quelle chance
nous avons de voir cet oiseau d'aussi près et nous faisant un tel spectacle
aérien. Moi qui suis si attentif aux sons, je suis aux anges d'avoir pu
l'entendre dans la nature et d'avoir vu son comportement lorsqu'il s'est
approché de nous avec lenteur et circonspection.
À l'heure du dîner, un Aigle Tyran
glisse devant nous, sans donner un coup d'ailes, porté par l'air chaud de mi-journée.
Après une couple d'heures de détente, nous repartons pour l'excursion d'après-midi.
Notre programme comporte la visite d'un petit sentier situé juste en avant du
centre de La Milpa: le Mahogany Trail. En plus d'observer des vieux spécimens de
cet arbre réputé, nous rencontrons des espèces intéressantes comme le Pic de
Pucheran (Black-cheeked Woodpecker), le Pipromorphe à tête brune (Sepia-capped
Flycatcher), le Moucherolle à croupion jaune (Sulphur-rumped Flycatcher), la
Paruline à couronne dorée (Golden-crowned Warbler) et le Viréon à calotte
rousse. Nous nous dirigeons ensuite au site de
compostage où nous observons pendant environ trente minutes. Les espèces
présentes sont les mêmes que la veille avec en prime un Troglodyte à ventre blanc très coopératif qui se nourrit au sol, de l'autre côté de
la fosse. Un nouvel animal s'y retrouve également. Un Agouti brun, genre de gros Cochon d'Inde qu'on rencontre très souvent dans les forêts tropicales, se
nourrit au sol, sans se soucier outre mesure de notre présence.
Nous prenons quelques minutes d'arrêt aux trous d'eau et
nous n'ajoutons pas d'espèces nouvelles à cet endroit. C'est au son du rire
moqueur du Macagua rieur (Laughing Falcon) que nous rejoignons le centre pour le
souper. Après le repas, nous faisons la liste quotidienne et un groupe fait une
dernière sortie. Même si nous couvrons le chemin opposé à notre première sortie,
nous enregistrons sept Chouettes mouchetées, une Buse à gros bec
(Roadside Hawk), une Amazone poudrée, trois Dindons ocellés et deux Engoulevents pauraque. C'est très impressionnant de
découvrir des gros oiseaux comme les dindons perchés dans des Cecropias, à
quelques 25 mètres du sol. C'est une image qui restera longtemps gravée dans ma mémoire.
Voici donc une portion de voyage que je n'oublierai jamais, tellement elle m'a fourni de belles observations. J'en ai quelques autres à vous parler. À suivre...
À bientôt.
2 commentaires:
Oh la la!
C'est un vrai carnet de bord que tu partages avec nous!
Je l'ai lu en diagonale mais je tâcherai de le relire à tête reposée après les fêtes!
En effet, le nombre d'espèces à y découvrir est impressionnant, mais je ne suis pas surprise au vu de ce j'avais déjà vu au Nicaragua!
Bravo pour ces belles photos, l'engoulevent est toujours une rencontre qui fait grimper l’adrénaline big time!!
Laval, je te souhaite d'excellents fêtes et une année 2014 riche en observations et photographie
Comme si j'y étais! J'ai suivi le déroulement de vos journées au Bélize avec grand plaisir. Je ne savais pas que des Mennonites y vivaient.
Quelle diversité et quelle richesse sous ces climats tropicaux. Heureusement que les zones protégées sauvegardent cette variété.
Bonne fêtes de fin d'année à vous et à votre famille!
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