vendredi 28 octobre 2016

Le peuple sauteur.




Il faut se rendre à l'autre bout du monde pour rencontrer ce peuple. Et même pour le grand rêveur que je suis, je n'imaginais pas le jour où je me rendrais en Australie, le pays des kangourous. Comme pour bien des gens, l'émission télévisée Skippy le kangourou a sûrement contribué à me faire connaître et apprécier cette espèce animale des plus singulières. Ce marsupial figure dans la liste des animaux exotiques qui hantent souvent le cerveau des enfants. Il cohabite très bien à côté des lion, éléphant, hippopotame, girafe, singe ou zèbre.


C'est en octobre 2011 que je me rends au pays d'Oz, du côté est de la grande île. J'ai bien des attentes, mais toutes seront éclipsées par la réalité australienne. Un pays fantastique à visiter, riche à tous les points de vue. Le but principal de ce voyage est l'observation des oiseaux, mais il est impossible de ne pas s'extasier devant les autres richesses naturelles que nous rencontrons. Et l'une de ces richesses est même devenu l'un des emblèmes animaliers du pays, le kangourou. J'écris "LE" kangourou et ça me fait sourire, car il y a vraiment plus d'une espèce de kangourou en Australasie (i.e. en Australie, Nouvelle-Guinée et les îles adjacentes). Le 5ième livre de la série Handbook of the Mammals of the World dévoile que la famille des macropodidés recèle 13 genres, 59 espèces et 88 taxons différents. En Australie, un kangourou mâle est appelé « Boomer », une femelle « Flyer » et un jeune kangourou « Joey ».


Et voici Skippy qui bondit littéralement vers sa mère. C'est une photo inestimable puisque Skippy était orphelin dans la série télévisée portant son nom et qui a été présentée au Québec et en France à partir de 1968.  En France, elle a été rediffusée en 1970 et en 2005. La Belgique l'a présentée à partir de 2011. Il s'agissait de 91 épisodes tournées à 25 km au nord de Sidney, dans le parc national Ku-ring-gai Chase et dans le parc contiguë de Waratah Park (devenu depuis le Waratah Park Earth Sanctuary). Ces épisodes ont été étalés sur 3 saisons et il aura fallu 9 Skippys différents pour réaliser tous ces tournages. Vous désirez connaître le nom de l'espèce interprétant Skippy ? Il s'agit du Kangourou géant / Macropus giganteus / Eastern Grey Kangaroo.


Le succès du kangourou sur le continent australien, si aride dans l'ensemble, s'explique par ses capacités exceptionnelles de reproduction et d’adaptation aux conditions difficiles du bush. Les kangourous se sont adaptés aux conditions très variées de l'Australie et la naissance d'un kangourou est un processus totalement sous le contrôle de la mère, en fonction des conditions de nourriture et des conditions climatiques.
Après un accouplement, si les conditions sont difficiles, en cas de sécheresse par exemple, la femelle peut retarder sa gestation pendant un maximum de 12 mois, alors que la durée normale est de 35 jours. De la même manière, une femelle peut remplacer immédiatement un jeune qui meurt prématurément dans la poche.

Le kangourou nouvellement né mesure environ 25 mm. Sans aide extérieure, il doit s'accrocher au poil du bas ventre de sa mère afin de gagner l'intérieur de la poche où il ira s'accrocher à l'une des 4 tétines. Plus il croîtra et plus il quittera de plus en plus longtemps sa tétine pour s'aventurer hors de la poche. Si pendant cette période, un autre nouveau-né partage la poche, chacun aura sa tétine et la mère produira 2 laits différents en fonction de l'âge du bébé.


La poche des macropodidés agit comme un asile réconfortant pour le jeune. Ici, nous en voyons un bien installé dans la poche protectrice maternelle et broutant l'herbe au même rythme que sa mère. Le tout se passe sur le terrain de golf de Mareeba, le 25 octobre 2011.


Quand le kangourou se dépense, il transpire pour évacuer son trop-plein de chaleur, rien de très original, mais contrairement à tous les mammifères qui une fois l'effort physique terminé suent et halètent, le kangourou stoppe immédiatement sa transpiration et n'évacue la chaleur qu'en haletant à un rythme soutenu 300 fois par minute. Le kangourou est le seul animal à posséder un réseau très fin de vaisseaux sanguins à la surface de ses avant-bras, qu'il lèche pour évacuer la chaleur de son corps.

  

J'ai dû me cacher derrière un tronc d'arbre pour capter cette scène d'une bataille entre deux mâles de Kangourus géants. Les antagonistes ne ménagent aucune tactique pour venir à bout de l'autre. Lorsque deux mâles se battent pour une femelle, il leur arrive de s'empoigner et de se boxer, mais si le combat devient encore plus violent, ils se mettent à sauter vers l'avant en se donnant des coups de pied qui peuvent atteindre des points très sensibles.


Plus nous nous déplaçons sur le territoire australien, plus nous traversons des habitats nouveaux et plus nous découvrons des espèces différentes de "kangourous". À travers les siècles, ces marsupiaux se sont adaptés à toutes les conditions climatiques, souvent extrêmes, retrouvées sur ce continent. Ma plus grosse surprise a été de découvrir autant d'espèces différentes, aux moeurs tout aussi disparates. J'aimerais vous en présenter quelques unes, juste pour vous donner le goût d'en découvrir davantage soit par des lectures, soit par l'idée folle de vous rendre vous aussi en Australie. Pourquoi pas ?


Alors que vous venez de découvrir le Kangouru géant, je vous présente ici le plus gros des marsupiaux, soit le Kangourou roux / Osphranter rufus / Red Kangoroo.



Je capte cette image à Hay Plains, Australie, alors que le soleil termine sa course dans le ciel en ce 29 octobre 2011. Une femelle de Kangourou roux se dresse après avoir constaté notre présence. Au début, nous ne voyons pas le jeune kangourou. Après quelques minutes, il sort sa tête et nous découvrons que c'est une femelle. Ce n'est pas toujours évident de le percevoir lorsque nous sommes à une certaine distance. Normalement, c'est le mâle de cette espèce qui est roux. Il est également plus massif que la femelle qui est normalement, elle, de couleur grise. Cependant, une femelle peut être rousse et un mâle peut être gris à l'occasion. Le dimorphisme sexuel est plutôt inhabituel dans la famille des macropodidés. Cette espèce fréquente les habitats ouverts arides et semi-arides. Son aire de distribution est vaste et elle se situe de l'intérieur des terres de l'est jusqu'à l'ouest du pays.


Alors que j'imaginais le kangourou comme étant un animal fréquentant les milieux herbeux ouverts, j'ai été surpris en découvrant cette espèce inféodée aux milieux plus rocheux. le Pétrogale de Mareeba / Petrogale mareeba / Mareeba Rock-Wallaby.



 Parmi les adaptations de saut dans les milieux rocailleux, le Pétrogale de Mareeba possède des extenseurs du talon plus volumineux que les autres espèces de pétrogales. Ces extenseurs sont moins sujets à se blesser lors de sauts périlleux alors que nous les comparons à d'autres espèces le faisant sur des sols plus réguliers. De plus, ils se servent de leur queue pour contrôler leur vol aérien.


Cette femelle de Pétrogale de Mareeba abrite un jeune dans sa poche ventrale. Chez cette espèce, les femelles engendrent un seul jeune à la fois et il semble qu'elles peuvent le faire n'importe quand durant l'année. Le jeune peut passer un peu plus de 6 mois dans la poche et il est sevré 2 à 3 mois plus tard. Le mâle atteint sa maturité sexuel entre 20 à 24 mois.




Le Pademelon à cou rouge / Thylogale thetis / Red-necked Pademelon est brun-gris avec le ventre crème et le cou et les épaules roux. Il vit dans les forêts des régions côtières de l'est de l'Australie. Principalement nocturne, il est très craintif et habite généralement les forêts tempérées à proximité de prairies, se cachant dans la forêt le jour et sortant dans la prairie le soir au crépuscule pour se nourrir. Il se reproduit à l'automne et au printemps dans le nord, en été dans le sud. Ses prédateurs comprennent le Dingo et le Renard roux. Cependant la destruction de son habitat, notamment par le défrichement des terres, est actuellement la plus grande menace pour l'espèce. Il n'est pas actuellement inscrit comme espèce en voie de disparition.




Le Wallaby de Parry / Macropus parryi / Whiptail Wallaby est aussi connu sous le nom anglais de Pretty-faced Wallaby. On  le trouve dans l'est de l'Australie depuis Cooktown, au Queensland, jusqu'à Grafton, en Nouvelle-Galles du Sud. Il se distingue par sa coloration plus pâle et une bande blanche sous son visage. La fourrure de ce visage est brun-chocolat et elle couvre son museau. On le rencontre dans les prairies et les forêts, en particulier sur des collines ou des pentes. Dans les prairies, ce wallaby broute principalement de l'herbe. Il mange aussi des monocotylédones dans les ruisseaux à proximité. Il s'agit principalement d'une espèce diurne. Il est actif le matin et tard dans l'après-midi, mais il peut continuer dans une mesure indéterminée pendant la nuit.



Le Kangourou-rat musqué / Hypsiprymnodon moschatus / Musky Rat-Kangaroo est le plus petit macropodiforme à être quadrupède et diurne. Il est le seul représentant de la famille des Hypsiprymnodontidés et il se rencontre dans les forêts humides du nord-est australien et en Nouvelle-Guinée. Malgré son nom, il ne saute pas quand il se déplace, il le fait en utilisant ses quatre pattes.


En incluant les espèces présentement éteintes, la famille des macropodidés comprendraient 63 espèces. 43 sont endémiques à l'Australie, 17 le sont à la Nouvelle Guinée et seulement 3 espèces se retrouvent sur les deux îles. Étant donné que l'expression de différences génétiques et/ou morphologiques sont présentes au sein de certaines espèces actuellement reconnues, il est probable que plus d'échantillonnage et de recherche donneront lieu à la reconnaissance d'espèces supplémentaires. Des taxons non reconnus actuellement peuvent exister aussi au sein du genre australien petrogale, dont les membres présentent un schéma complexe de différenciation et de diversification qui a longtemps intrigué et rendu perplexes les chercheurs. Ce genre a été le centre de beaucoup de recherches récentes, avec quatre nouveaux taxons décrits depuis les années 1990 et trois autres élevés au rang d'espèce.


@ bientôt.





mardi 18 octobre 2016

Des oiseaux en septembre 2016.



Après un très beau séjour sur l'Île-aux-Basques au début de septembre, le reste du mois a été plutôt tranquille. Nous avons fait quelques sorties à nos endroits fétiches. Même si nos recherches de nouveautés pour l'année ont été peu fructueuses, nous avons quand même vécu de beaux moments.


Le 10 septembre, nous partons tôt pour nous rendre jusqu'à Saint-Denis-de-la-Bouteillerie afin d'y trouver le Bécassin à long bec qui y est présent depuis quelques jours. Il est réputé se tenir avec un petit groupe de Bécassins roux et nous comptons bien le repérer. Dès notre arrivée, notre attention est portée vers des limicoles posés sur des rochers tout près de la rive. Nous identifions rapidement les Bécasseaux maubèche, sanderling, semipalmé et Pluvier argenté. Et oups ! voilà 5 Bécassins roux en repos avec le bec dans le dos pour la plupart d'entre eux. Une étude très minutieuse nous permet d'écarter le Bécassin à long bec. Après environ 30 minutes, nous décidons de partir. Un groupe d'observateurs, mené par Mireille Poulin, est encore sur place. Nous apprendrons par la suite que le fameux bécassin est arrivé en vol après notre départ. Il y a des journées comme ça. Un arrêt sur les battures de Kamouraska nous fait rencontrer un oiseau que je n'espérais pas photographier de si près. Il se tient également sur les rochers. Il les parcoure en marchant et, à cause des dénivellations, il arrive que nous le perdions de vue. Si nous ne le voyons, il ne nous voit pas. Profitant de chaque instant où je le perds de vue, je finis par m'approcher à moins de quatre mètres de lui.



Le Pipit d'Amérique / Anthius rubescens rubescens / American Pipit s'observe le plus souvent en groupes et dans les champs.



Cette espèce fréquente les milieux ouverts et on le retrouve souvent dans les milieux agricoles où le sol a été chamboulé depuis peu par la machinerie agricole. Elle accompagne souvent les alouettes et des limicoles comme les Pluvier bronzé, Pluvier kildir, Bécasseau de Baird, Bécasseau roussâtre et Bécasseau à poitrine cendrée.


Notre prochaine destination est Cacouna où un Pélican d'Amérique / Pelecanus erythrorhynchos / American White Pelican pourrait bien nous y attendre. Et oui, il est là, bien occupé à se nourrir dans la grande étendue d'eau formant le bassin principal.


Le Pélican d'Amérique est rarement observé au Québec. Au Canada, cette espèce se reproduit sur les plans d'eau des grandes plaines s'étendant au centre du pays (Manitoba, Alberta, Saskatchewan). Sa distribution est beaucoup plus grande aux États-Unis alors qu'il occupe les deux tiers du territoire à partir du Pacifique vers l'est. Par contre, il s'observe sur les côtes de la "pan handle" floridienne. Il est difficile de déterminer avec certitude d'où proviennent exactement les pélicans qui atteignent le Québec.


Enchantés de cette belle trouvaille, nous prenons le chemin du retour vers Québec avec un arrêt incontournable au quai Boulanger de Montmagny. Des fois que le Bécassin à long bec s'y trouverait. Après tout, c'est l'endroit où nous l'avons observé le plus souvent au Québec. La marée est plutôt basse, mais une belle surprise nous attend. Nous estimons à environ un millier le nombre de Bécasseaux semipalmés / Calidris pusilla / Semipalmated Sandpipers agglomérés sur les rochers jouxtant le quai. 



Un mouvement continuel anime tous ces groupes d'oiseaux. Des individus s'envolent, d'autres atterrissent. Tout se fait très rapidement. Vu le grand nombre, les oiseaux doivent se serrer s'ils veulent avoir une place pour se reposer ou faire leur toilette. La promiscuité fait partie de leur mode de vie.



Cette photo montre un oiseau arrivant en vol et qui, faute de place disponible, ne peut faire autrement que de se poser sur le dos d'un oiseau déjà installé. Il n'y restera qu'une fraction de seconde, dès que l'oiseau harassé se tassera. Une vie plutôt stressante pour d'aussi petits oiseaux. Comme on dit, il n'y a pas de lunch gratuit.



Et voilà qu'un Faucon émerillon passe en vol et TOUS les bécasseaux s'envolent simultanément, tout en formant un groupe très serré. Ce comportement inné est essentiel à leur survie lorsqu'ils sont en présence d'un prédateur. Le faucon ne réussit sa chasse que lorsqu'il peut se concentrer sur un seul individu. Il le poursuit alors sans relâche. Devant plusieurs individus, il ne sait lequel choisir et son hésitation permet à ses proies potentiels d'échapper à son attaque.




En solo, cet individu constitue une bien belle proie pour un virtuose de l'attaque en vitesse, tel le Faucon émerillon ou le Faucon pèlerin.


Et, pour terminer, voici une autre espèce abondante en migration, mais que l'on retrouve en plus petit nombre à cet endroit.




Ce Pluvier semipalmé / Charadrius semipalmatus / Semipalmated Plover se pose sur un rocher dénudé d'autres limicoles. Bien sûr, il n'y rencontre aucune opposition i.e. qu'il n'a pas à se débattre pour trouver un lieu paisible, mais qu'en serait-il lors du prochain passage d'un prédateur ailé ?



@ bientôt,