mardi 9 août 2016

Les limicoles en migration.




Nous voici au début d'une vague migratoire qui mettra en vedette les limicoles. Cette appellation de limicole vient du latin limus qui peut être traduit par limon ou par vase. En effet, la majorité des espèces d'oiseaux appartenant à cette catégorie consomme des petits invertébrés vivant dans la vase ou dans l'humus. Nous les retrouvons surtout en bordure de mer, de lac ou de rivière, mais quelques espèces préfèrent les lieux humides comme les marécages ou, tout simplement, les endroits inondés par les pluies automnales dans les champs. Quelques autres privilégient les milieux ouverts où l'herbe est très courte, comme dans leurs lieux de nidification, ou lorsque la terre a été chamboulée sous l'action de la machinerie agricole.


J'ai déjà écrit plusieurs billets sur ces oiseaux fascinants et, si je le fais encore, c'est juste pour attirer votre attention sur ce phénomène qui se déroule présentement et qui atteindra son apogée dans quelques semaines. Quand nous nous mettons plus sérieusement à l'ornithologie, nous nous apercevons très vite qu'il existe des temps forts dans une année pour l'observation de différentes espèces. Les migrations, printanière et automnale, figurent parmi les temps forts. Nous voici présentement à l'aube de la migration automnale. Si pour les passereaux le tout commence en septembre, les limicoles ont terminé leur saison de nidification plus au nord et ils entreprennent un périple qui les mènera, aussi loin que la Terre de Feu, au sud de l'Argentine, du moins pour certaines espèces comme le Bécasseau roussâtre / Tryngites subruficollis / Buff-breasted Sandpiper.



L'élégant et coloré  Bécasseau roussâtre se rend aussi loin que la Terre de Feu, à l'extrême sud de l'Argentine, pour y passer notre hiver.



Pour les intéressé(e)s, voici les endroits où doit se porter votre attention si vous désirez en observer.



Mais d'abord, avant de vous déplacer vers ces lieux, il est important de vérifier s'il n'y aurait pas dans votre région rapprochée un endroit propice aux regroupements d'oiseaux de rivage en migration. Les sites les plus "payants" sont ceux où les décharges des rivières rejoignent le fleuve. À marée basse, l'eau douce apportée par ces rivières contient beaucoup de nouveaux nutriments qui font sûrement l'affaire des oiseaux avides de retrouver des forces en gobant tout ce qui se présente sous leur bec.


Pour ma part, dans le comté de Lotbinière, j'ai repéré deux endroits propices. Au niveau de Leclercville, la rivière du Chêne se déverse dans le fleuve Saint-Laurent et j'y ai observé plusieurs espèces de limicoles au fil des ans. La même chose à Sainte-Croix où l'eau s'écoulant de la Rivière du Petit Saut aboutit à une belle chute d'une quinzaine de mètres et s'écoule en un filet plus ou moins mince dans la zone intertidale du grand fleuve. Ce lieu permet la concentration de petits groupes d'oiseaux de rivages en migration. Qu'en est-il pour vous ?  Une recherche sur Google Map pourrait vous aider à faire le point.



Mais une fois que les endroits sont définis, il reste un facteur très important: le niveau des marées. À marée très haute, les oiseaux ne sont pas là. Ils s'éparpillent dans les lieux humides où la nourriture est plus abondante et surtout accessible plus facilement. À marée très basse, les oiseaux sont là, mais les zones de nourrissage sont tellement répandues qu'il n'y a pas une grande concentration d'individus au même endroit. L'heure idéale est deux heures avant la marée haute. En envahissant progressivement la zone intertidale, l'eau pousse les oiseaux vers le rivage. Les zones de nourrissage s'amenuisant, les différents groupes se rejoignent et peuvent former une bande de centaines, voire de milliers d'individus. Quand vous découvrez de tels lieux, c'est le bonheur total. Suffit d'une bonne lunette d'observation et de la patience pour identifier les différentes espèces qui s'activent devant vous.


D'autres endroits qui attirent les limicoles sont les décharges d'eaux usées des villes et villages dans les cours d'eau ou dans les bassins de rétention d'eaux usées. Plusieurs villes et villages utilisent de tels bassins. 


Pour ma part, voici mes places préférées où je fais des visites fréquentes dans ma quête de limicoles.


La baie de Saint-Vallier et la décharge de la Rivière Boyer sont visités régulièrement pour ne pas dire religieusement par une horde d'ornithologues en manque de limicoles. Le niveau d'adrénaline peut augmenter de façon significative lorsque les espèces vedettes sont aux rendez-vous: Bécasseau de Baird, Bécasseau roussâtre, Barge marbrée, Barge hudsonienne...



Le Bécasseau de Baird passe souvent inaperçu. Plus furtif que les autres petits limicoles, il se dissimule plus fréquemment dans la végétation riparienne.



Le quai Boulanger à Montmagny est un endroit idyllique pour observer de très bons rassemblements de limicoles. Situé tout près des chutes de la Rivière-du-Sud, ce quai a été aménagé de belle façon et les oiseaux sont très près des observateurs. C'est l'endroit de prédilection pour y retrouver les espèces suivantes:



Alors que le Bécassin à long bec volète d'un rocher à l'autre, un Bécasseau à échasses se dresse bien droit, alarmé par un Faucon émerillon qui passe en vol. Le bécasseau est à l'extrême gauche avec une couronne très foncée, un trait sourcilier blanc et un bec mince et recourbé vers le bas. Sa poitrine est plus colorée que les autres (légèrement beige). Photo réalisée le 29 août 2015 à partir du quai Boulanger, Montmagny.



Le Bécassin roux est une espèce sûre au quai Boulanger de Montmagny.



Bécasseau minuscule (en vol) et Bécasseau variable.



Phalarope de Wilson au centre, Bécasseau à échasse à gauche et Grand Chevalier à droite. Prise réalisée en digiscopie, au quai Boulanger, Montmagny, le 15 août 2010.



Le Phalarope à bec étroit est un des fidèles au quai de Montmagny. Il passe cependant très vite. Réalisé en digiscopie le 12 septembre 2009 au quai Boulanger.



Le Bécasseau semipalmé forme des groupes pouvant atteindre la centaine d'individus. Photo réalisée le 08 septembre 2007 à partir du quai Boulanger à Montmagny.


Les rivages du Saint-Laurent au niveau de Kamouraska sont reconnus également pour héberger les limicoles en migration. Voici quelques autres espèces observables à ces endroits.



Bécassin roux et Petit Chevalier. Saint-Denis-de-la-bouteillerie, le 30 août 2015.



Bécasseau minuscule. Saint-Denis-de-la-bouteillerie, le 30 août 2015.



Bécasseau roussâtre. Kamouraska, le 30 août 2015.



Dans la région de Trois-Pistoles, les trois lieux pouvant permettre de belles trouvailles sont: la rivière Trois-Pistoles, la grève Morency et la grève Leclerc. Une recherche sur Google Map vous permettra de les localiser rapidement. Il est bon de se retrouver deux heures avant la marée haute à la décharge de la rivière Trois-Pistoles. J'y étais encore dimanche dernier pour observer la Mouette atricille qui s'y tient depuis une semaine. L'an dernier, c'était un rare Chevalier semipalmé qui y a passé quelques jours.



Chevalier semipalmé photographié le 04 mai 2015 en Floride.


Mon endroit préféré restera toujours l'Île-aux-Basques, petite île sympathique flottant au large de Trois-Pistoles. Il faut obligatoirement y passer au moins quelques jours si nous voulons apprécier toutes les richesses naturelles présentes en ce lieu accueillant et unique au monde. La longue pointe de sable qui se dégage au sud à marée basse, les rives sablonneuses à l'ouest, la zone rocheuse à l'est et les sites d'observation vers le nord constituent un amalgame incroyable pour y faire des découvertes intéressantes. Aucun séjour n'est semblable aux précédents et c'est ce qui nous attire, Anne et moi, année après année. Le fait d'occuper un chalet sur place nous permet de profiter des meilleures heures d'observation que ce soit pour les oiseaux marins ou pour les oiseaux forestiers.




Bécasseau sanderling. Prise le 19 septembre 2015 sur l'Île-aux-Basques.



Bécasseau variable. Prise le 19 septembre 2015.



Le Bécasseau violet est une spécialité de l'île, mais il ne s'observe que tôt ou tard durant l'année. Ici, je l'ai photographié le 22 mai 2011. Il faut attendre à la mi-octobre pour son passage automnal à l'île.



Le Bécasseau à croupion blanc passe souvent inaperçu à cause de sa ressemblance avec le Bécasseau semipalmé, mais sa plus grande taille, son sourcil blanc prononcé et le bout des ailes dépassant la queue sont des traits caractéristiques si nous ne pouvons voir le croupion parfaitement blanc. Photographié le 08 octobre 2011.



Si le Tournepierre à collier arbore des couleurs éclatantes au printemps (ici, en Floride le 6 mai 2015)...


il en est bien autrement à l'automne où l'espèce exhibe un plumage internuptial et où la présence d'oiseaux immatures est abondante. Photo réalisée le 31 août 2013, à l'Île-aux-Basques.


Dans quelques semaines, un séjour de 4 jours est prévu sur l'île magique. Peut-être y retrouverons nous encore notre espèce fétiche, le Bécasseau roussâtre ? Nous y avons déjà observé trois individus en même temps.  Je le laisse vous saluer.






@ bientôt.