mardi 21 juillet 2015

Le fou de l'île.



Quand le grand oiseau blanc s'envole et pourfend l'air de sa plume, comme Félix Leclerc l'a si bien fait dans le ciel bleu du Québec d'antan, aucun mot ne peut rendre grâce à la vie qui s'en dégage. Quand la plume sert à la survie, non à la polémique, le mot n'a plus d'orthographe et il se lit dans toutes les langues du monde. Vole mon bel oiseau blanc et ébahit notre âme. L'homme a besoin de beauté et d'émerveillement pour continuer à rêver et à évoluer.











































@ bientôt.







jeudi 16 juillet 2015

Ces habitués des conditions extrêmes.



La semaine dernière, une courte escapade de quatre jours en Gaspésie nous a encore fait réaliser combien certaines espèces d'oiseaux sont vouées à des vies où les conditions météorologiques adverses sont monnaie courante. J'ai toujours été fasciné par ces animaux qui doivent survivre dans des conditions où nous, pauvres humains laissés à nous mêmes, ne tiendrons pas très longtemps. Le fait qu'ils soient encore là dénote nécessairement qu'ils ont su s'acclimater à ces conditions sinon ils n'existeraient plus.

Dans mon échelle d'évaluation de la tolérance aux intempéries, les oiseaux marins occupent le sommet. Comment des êtres comptant sur de simples plumes comme moyen de protection peuvent-ils survivre à des écarts de température intenses, aux eaux froides, à des vents violents et à des mers déchaînées qui prévalent dans l'immensité des océans ???  Et que dire de leurs conditions de nidification alors qu'ils doivent accrocher leurs nids littéralement à des murs rocheux vertigineux. Chaque cavité ou chaque saillie du rocher offrant un espace assez grand est occupé par un couple nicheur. Et voici un exemple probant où le parent qui couve n'a d'autre vision que le mur grimpant à 90° tout au bout de son bec.



Passeriez-vous de 23 à 32 jours (le temps normal de la couvaison) à regarder un mur rocheux vertical, sous la pluie, sous un soleil ardent ou aux prises à des vents violents ? Et bien c'est pourtant le karma de cet adulte de Mouette tridactyle. Photo prise à l'Île Bonaventure le 5 juillet 2015.

Et comme si ce n'était pas assez, chaque site de nidification doit être chèrement défendu puisque ces espèces nichent habituellement en colonies très denses. Chaque centimètre de terrain est important et les parents veillent méticuleusement à ce que les limites territoriales soient respectées par les voisins. Comment chaque individu fait-il pour s'y retrouver dans tout ce brouhaha demeure un mystère, pour moi du moins.



Un Fou de Bassan atterrit à l'emplacement que le couple a choisi. Choisi est peut-être un bien grand mot vu la grosseur de la colonie. Les matériaux utilisés pour la confection du nid sont des algues, de l'herbe ou toute matière végétale disponible près du site. 




Alors que la photo du haut montre un fou apportant des algues, celui-ci arrache de l'herbe qui pousse en périphérie de l'emplacement de la colonie. Il ne fera que quelques pas pour la laisser choir au sol. Et voilà que la confection du nid est entreprise.



Cet oisillon n'a que quelques heures de vie. On peut voir la "dent" claire au bout du bec qui lui permet de briser la coquille de l'oeuf. L'adulte le garde au chaud entre la paillasse et les plumes de son ventre.


 
Environ une semaine plus tard, son corps a quintuplé et il est couvert d'un duvet blanc.


Et s'il ne manque pas de nourriture, s'il évite les prédateurs et s'il survit aux embûches qui l'attendent lors de ses premiers vols, il pourra aspirer à devenir l'un des oiseaux de mer les plus élégants qui soit.






Car des embûches, il y en a plus d'un à éviter sur l'Île Bonaventure. Selon les dires de la guide biologiste en service, le prédateur terrestre le plus efficace est le Renard roux. Il est friand des oeufs et il ne dédaigne pas s'occuper des jeunes oiseaux mal en point. Anne et moi n'en avons pas vu lors de notre visite de quelques heures, mais il est bien présent sur l'île. Par contre, un Faucon pèlerin est venu se percher sur un grand poteau avec dans ses serres un oisillon d'un laridé (goéland ou mouette) qu'il a déplumé allégrement devant nos yeux. Ça se passait dans le village de Percé, mais ceci aurait tout aussi bien pu se produire sur l'île même. Par contre, deux gros prédateurs ont été aperçus à partir du bateau lorsque nous avons fait le tour de l'île. Deux beaux Pygargues à tête blanche.

 

Un pygargue, un immature d'environ quatre ans, regarde passer un fou le long de la falaise du côté nord de l'île. S'il ne s'attaque pas à un adulte en pleine forme, le prédateur pourrait très bien s'occuper d'un jeune laissé sans surveillance. Pas très loin de là, un autre pygargue d'environ trois ans fait le guet.



Parmi les autres prédateurs, il ne faut pas oublier le Grand Corbeau et le Goéland marin, deux espèces qui nichent à proximité des colonies et qui ne dédaignent pas non plus les oeufs et les jeunes oisillons.



Nous avons dénombré quatre Grands Corbeaux lors de notre visite, répartis autour de l'île.

 
Le Goéland marin est le plus gros des laridés présents au Québec et il est un prédateur omniprésent dans les colonies d'oiseaux marins sur la côte où il se nourrit d'oeufs et d'oisillons.


En contre-bas, une dizaine de Phoques gris se reposent sur les rochers. Ils se nourrissent des mêmes poissons dont le fou raffole et ils sont des compétiteurs directs.Plusieurs personnes croient qu'ils sont la cause de la diminution drastique des maquereaux dans le secteur, mais ceci reste à prouver. Chose certaine, les Fous de Bassan doivent maintenant parcourir de grandes distances afin de se sustenter eux-mêmes et de ramener de la nourriture aux rejetons. 

 

Le mâle du Phoque gris est gris foncé, presque noir, et la femelle est plus ou moins gris pâle.


Dernièrement, via le forum Ornitho-Québec, l'ami Raymond Belhumeur a attiré notre attention sur un article du journal Le Devoir relatant la baisse impressionnante des effectifs des Fous de Bassan et d'autres populations d'oiseaux de mer. Il s'agit du nombre astronomique de 69.7% depuis 60 ans, soit la période s'étalant de 1950 à 2010. Possiblement en raison du réchauffement des eaux du golfe du Saint-Laurent, leur proie favorite, le maquereau, se serait déplacée davantage au nord. Or, les plus grands trajets désormais nécessaires pour retrouver des maquereaux sont épuisants pour les oiseaux, qui doivent nourrir leur progéniture. En plus d’affecter les adultes, le phénomène nuit aux poussins, laissés souvent trop longtemps seuls dans le nid. La naturaliste du parc de l'Île Bonaventure nous a dit qu'ils estimaient actuellement la population de l'île à 51 000 couples nicheurs. Ceci constitue la plus grande colonie en terre d'Amérique.


 Je ne voudrais pas terminer ce billet sans vous présenter d'autres espèces facilement observables près de Percé et de l'Île Bonaventure.



Le petit Guillemot à miroir s'observe en bonne quantité dans la région. Il niche dans les cavités rocheuses qui les protègent des prédateurs. J'ai photographié cet individu en bordure de la 138, près de Gros Morne. Il est facilement observable à Percé même, à partir du quai et tout autour de l'Île Bonaventure.




Le Petit Pingouin est abondant à Percé où il niche également dans les cavités rocheuses.



Le Guillemot marmette est un autre alcidé très abondant à Percé. En vol et à distance, nous pouvons le confondre avec le Petit Pingouin, mais son bec effilé et sa couleur brunâtre permettent de le différencier assez facilement. Il niche en compagnie des pingouins dans les nombreuses cavités.



L'Arlequin plongeur est l'espèce d'anatidé que nous voulons toujours avoir la chance d'observer lors d'une tournée de la Gaspésie. Ces deux individus immatures ont été captés tout près du quai de Percé. Nous avons été très chanceux de les trouver puisqu'ils n'avaient pas été rapportés depuis quelques jours.


 
S'il n'est pas nécessaire de se rendre en Gaspésie pour être en présence d'une crèche d'Eiders à duvet, avouez que le spectacle vaut le coup d'oeil. Image captée près de l'Île plate où le Grand Cormoran niche également. Ce dernier niche aussi en bon nombre sur le fameux Rocher percé.


 Et pour finir, une photo de la très élégante et acrobatique Mouette tridactyle.







Un tour de la Gaspésie est un incontournable au Québec pour un passionné de nature et de photographie. Il y a tant à voir et à apprécier. Allez-y et vous m'en reparlerez.


@ bientôt.



mardi 7 juillet 2015

Le bonheur de nourrir les oiseaux toute l'année.




Le nourrissage des oiseaux, par le biais des mangeoires à graines que nous installons dans nos cours  ou dans les parcs urbains, éveille souvent une polémique sur le bien fondé de cette action. Faisons nous bien d'agir de la sorte ? N'y a-t-il pas un danger de changer le comportement des oiseaux en établissant une dépendance entre eux et nous ? Est-ce que nous pouvons même induire quelques individus à renoncer à la migration vers le sud en leur offrant de la nourriture ? Répondre à ces questions n'est pas simple et les réponses évoquées peuvent relever autant sinon plus de la subjectivité que de l'objectivité. Chacun y va avec ses pour et ses contre. Et notre souci altruiste de leur fournir de la bouffe peut cacher un désir bien égoïste de se les approprier un peu. Et bien oui, je l'avoue, je suis l'un de ces altruistes égoïstes, un homme rempli de contradictions, mais surtout mené par une passion pour la nature. Dès que j'ai possédé une maison, j'ai aménagé graduellement le terrain en vue d'attirer les oiseaux en plantant des arbres fruitiers, des arbustes et des fleurs qui plairaient aux frugivores, aux insectivores, aux granivores et aux nectarivores. Naturellement, les mangeoires, l'abreuvoir à colibri, les nichoirs à hirondelles ainsi qu'un petit bain d'oiseaux sur pied sont venus compléter le tout.

Je sais que la très grande majorité des propriétaires de poste d'alimentation commencent à nourrir tard à l'automne et ferment boutique à la fin du printemps. Personnellement, je n'ai jamais fait ça. Au contraire, mes mangeoires sont remplies à l'année. Malgré l'étalement sur quatre décennies, je n'ai jamais retenu chez moi une espèce migratrice. Je les accueille dans ma cour au printemps et à l'automne, sans plus.Tout comme les êtres vivant en nature, les oiseaux se doivent d'être opportunistes pour garantir leur survie. À ceux qui craignent de vouer les oiseaux à une mort certaine s'ils arrêtent de les nourrir pendant quelque temps, même en période très froide, je leur dis que les oiseaux sauront bien suppléer au manque de graines en s'alimentant de ce qu'ils trouveraient normalement s'il n'y avait pas de mangeoires. Et leur donner un coup de main en leur procurant une nourriture "facile" lors des grands froids est une aide qu'ils apprécient grandement.

Mon intention dans ce billet n'est pas de fournir des photos des espèces hivernantes habituelles, mais bien de vous montrer des espèces nicheuses en été ou de passage en migration qui apprécient le buffet que nous installons dans notre cour.


En Avril et en Mai


En migration, les granivores que sont les bruants et les juncos ne sautent jamais une année pour nous visiter, même si notre cour est en ville, à quinze minutes à pied des centres d'achats et du trafic intense du boulevard Laurier, à Québec.


Le sifflement du Bruant à gorge blanche est un bon indice que les vagues migratrices sont bel et bien amorcées.


Il est souvent accompagné du Bruant fauve et c'est toute une joie lorsqu'il fait entendre sa jolie ritournelle.



Le Bruant chanteur n'est pas que de passage, il niche toujours dans le voisinage.



Le Bruant à couronne blanche est moins présent que les précédents et son chant trahit sa présence.



Le Bruant familier est un assidu à notre cour et il niche aux alentours à chaque année.






Le Junco ardoisé arrive en petits groupes et il anime notre cour de ses trilles pendant plus d'une semaine.


Tous sont granivores et les graines qui tombent des plateaux n'échappent pas à leurs recherches. De plus, mon expérience me fait croire que les oiseaux sont attirés par le cri de leurs congénères ou par celui d'autres espèces. L'activité attire l'activité et il n'est pas rare de voir cinq ou six espèces différentes en même temps autour et dans les mangeoires.



En Juin, Juillet et Août


Rien n'est plus réjouissant pour celui qui accueille les oiseaux dans sa cour que de voir les parents accompagner leurs jeunes au poste d'alimentation.


Ici, une femelle adulte de Pic chevelu amène son jeune, identifiable à sa couronne colorée, au poste d'alimentation sur la rue Higgins à Chateauguay. Quelques jours plus tard, j'observais la même chose dans ma cour à Sillery, ville de Québec.

 

Un adulte de Quiscale bronzé fait de même en offrant cette graine de tournesol noir à son rejeton. Dès le lendemain, j'ai vu ce dernier revenir seul pour cueillir d'autres graines par terre. Ça n'a duré que quelques jours et il n'y avait plus de quiscale dans ma cour. Ceci démontre bien l'opportunisme des oiseaux qui ne s'attardent pas lorsque l'instinct leur commande de passer à autre chose.


Nous savons que les jeunes des passereaux, même s'ils ne sont pas insectivores, sont d'abord nourris d'insectes, car ils sont plus riches en calories et ça leur permet de grossir plus vite. Le Bruant chanteur, à l'instar de bien d'autres espèces, commencent d'abord par les nourrir d'insectes et d'arthropodes lorsque ces derniers sont au nid.



Des petits cris stridents et insistants me font savoir que c'est maintenant notre fidèle Bruant familier qui vient nourrir ses jeunes aux mangeoires. Cette activité nous permet d'observer les différentes espèces dans leur livrée juvénile qui est souvent différente de celle adulte. Les jeunes ont souvent les parties inférieures du corps striées alors qu'elles sont unies lorsque l'oiseau acquiert sont plumage adulte.


La Mésange à tête noire est une espèce qui fréquente nos mangeoires TOUTE L'ANNÉE. Tellement qu'elle a niché à au moins une reprise juste en haut du poste d'alimentation. Elle aussi amène ses rejetons. J'en ai été témoin à deux reprises cette année.


Non, je ne veux absolument pas convaincre quiconque de la pertinence de maintenir un poste d'alimentation ouvert à l'année. Mais le bonheur que vous retirerez en vaudra peut-être la chandelle..


@ bientôt.